Peinture Flamande et Hollandaise. XVe - XVIIIe siècle

«[...] comment ne pas voir dans la pelure suspendue du citron le ressort détendu du temps, que l'a conque plus haut de l'escargot de nacre nous montre remonté et récupéré, tandis que le vin à côté dans le vidrecome établit comme un sentiment de l'éternité ?»

Paul Claudel, Introduction à la peinture hollandaise, 1934.

L'ensemble des 213 peintures flamandes et hollandaises du musée des Beaux-Arts de Strasbourg (XVe-XVIIIe siècle), un des plus prestigieux conservés dans un musée français, comporte en particulier les oeuvres de Memling, Lucas de Leyde, Kalf, Ruisdael, Witte, Rubens, Van Dyck, Jordaens ou Sweerts.
S'appuyant sur les recherches les plus récentes, cet ouvrage présente l'histoire franco-allemande de la constitution de ce fonds, de 1890 à nos jours, et propose pour chaque oeuvre une notice détaillée.

Extrait du livre :
Propos Liminaires à un catalogue scientifique

Longtemps attendue, la parution du catalogue scientifique des peintures nordiques (flamandes et hollandaises) du musée des Beaux-Arts de Strasbourg est un événement dans la vie de notre institution. À cette occasion, la quasi-totalité des oeuvres est présentée temporairement dans la galerie Heitz et dans les salles mêmes.
Le fonds nordique résulte de l'action déterminée de certaines grandes personnalités, et en premier lieu de Wilhelm Bode, conservateur berlinois qui refonda le musée à partir de 1890. Spécialiste des écoles hollandaise et flamande, il sut dénicher dans le maquis du marché de l'art européen de quoi composer un ensemble cohérent et séduisant, reflétant le goût de son époque. L'école de Ruisdael, ainsi, est particulièrement bien représentée à Strasbourg. Il sut aussi convaincre plusieurs collectionneurs allemands de faire oeuvre patriotique envers ce musée dont les collections avaient été anéanties en 1870. Il serait passionnant de comparer oeuvre par oeuvre l'action de Bode à Strasbourg et à Berlin, mais aussi d'affiner toujours plus les enjeux politiques sous-jacents.
Lui succéda Hans Haug, dont les musées de Strasbourg étudieront l'action tout prochainement. Avec un goût moins «patricien» que Bode, Haug ajouta quelques notes audacieuses au bouquet de très haute qualité mais très «sage» de Bode : il en fallait, du courage, pour faire acheter les Hommes se baignant de Sweerts ou le si atypique Socrate, ses deux épouses et Alcibiade ! Haug s'attacha aussi à constituer un ensemble unique de natures mortes européennes, genre clans lequel les artistes du Nord brillèrent tout particulièrement. Enfin, il publia en 1958 le complet Catalogue des peintures anciennes, encore si utile. Un échange de dépôts du Louvre, effectué avec le musée de Poitiers, nous a apporté, avec le Vase de fleurs et de fruits de Verbruggen le Jeune, la nature morte ostentatoire qui nous manquait. Enfin, le récent legs consenti par M. et Mme Eisenbeth nous vaut de posséder aujourd'hui, pour ne citer qu'une oeuvre, la puissante Vanité de Gysbrechts.